Lisez le PI scope et faites des économies : finie la redevance copie privée pour les professionnels !

Il était attendu par certains depuis 2 ans, par d’autres depuis presque 30, le décret manquant pour que les professionnels obtiennent le remboursement de la redevance copie privée a enfin été publié le 12 décembre 2013 ! Décryptage en quelques paragraphes…

Joyeuses Pâques ! par Tax Credits – CC BY 2.0

Article republié sur  JDN-Journaldunetsanscadre

Souviens-toi l’été dernier

L’exception de copie privée est bien évidemment un sujet que vous maîtrisez parfaitement grâce à notre trilogie (Part I : Les conditions de l’exception / Part 2 : Les balbutiements jurisprudentiels jusqu’à la réforme de 2011 / Part 3 : La source licite et ses conséquences)

Pour résumer en quelques lignes, l’exception de copie privée permet à l’utilisateur d’une œuvre d’en faire une copie sous la triple condition que :

  • la source de la copie soit licite,
  • la copie soit réalisée directement par l’utilisateur et non par un tiers,
  • la copie soit à usage privé et non collectif.

Cette exception ne pouvait se faire sans contrepartie. Pour compenser la perte de revenus potentiellement engendrée par cette exception, le législateur a instauré la rémunération pour copie privée (RCP) reversée aux acteurs de la création artistique.

Ainsi, lorsque vous achetez un support de stockage vierge (CD, DVD, disques durs etc.) ou un appareil multimédia permettant de stocker des œuvres (tablettes, smartphones, baladeurs, etc.) une partie du prix que vous payez est pour la RCP. Cette redevance est ensuite collectée par Copie France auprès des fabricants et importateurs de ces supports, qui la redistribue à hauteur de 75% pour les ayants droits et 25% pour le financement d’actions culturelles.

Un nouvel espoir

Dès l’instauration de la rémunération pour copie privée par la loi du 3 juillet 1985 (l’ère des cassettes) la question de son remboursement aux professionnels s’est posée. En effet, ces derniers ne peuvent bénéficier de l’exception de copie privée car l’utilisation qu’ils font des œuvres est collective et/ou commerciale. Pourquoi seraient-ils alors contraints de payer cette redevance ?

Bien qu’évidente, il aura fallu attendre le 21 octobre 2010 (25 ans!) et l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), « PADAWAN contre SGAE », pour qu’une réponse claire soit apportée : les professionnels ne sont pas tenus au paiement de cette redevance.

Papy fait de la résistance

Un an plus tard, le Conseil d’Etat s’alignait sur la position de la CJUE. Puis, le 20 décembre 2011, le législateur autorisait enfin les professionnels à s’exonérer de cette redevance. Il était alors ajouté un paragraphe II à l’article L311-8 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel :

« La rémunération pour copie privée n’est pas due non plus pour les supports d’enregistrement acquis notamment à des fins professionnelles dont les conditions d’utilisation ne permettent pas de présumer un usage à des fins de copie privée. »

Le paragraphe III de ce même article conditionne le remboursement de la redevance copie privée à la production de « justificatifs déterminés par les ministres chargés de la culture et de l’économie » ou à la conclusion d’une convention spéciale avec une société de gestion de droits d’auteur (à ce jour environ 1700 entreprises sont concernées).

Le même jour un arrêté ministériel précisait les documents nécessaires pour obtenir ce remboursement, à savoir :

  • les coordonnés du professionnel et une copie de ses statuts,
  • un extrait Kbis ou D1 de moins de 3 mois,
  • une déclaration sur l’honneur selon laquelle les supports achetés ne seront pas utilisés dans le cadre de l’exception de copie privée,
  • tout document permettant d’établir que l’utilisateur du support est informé qu’il ne peut l’utiliser que dans le cadre de son activité professionnelle et que l’usage à des fins de copie privée est assujetti à la rémunération pour copie privée,
  • une facture en nom propre comportant les caractéristiques du support d’enregistrement et le montant de la rémunération pour copie privée acquittée lors de l’achat.

Seul problème, rien n’obligeait les revendeurs à mentionner le montant de la redevance sur leur facture.

Or, sans cette indication, impossible d’obtenir le remboursement de la redevance. Dans la pratique, aucun revendeur ne s’y est contraint volontairement. L’intervention du législateur devenait donc impérative. Celle-ci s’est fait attendre…

La CJUE dans un arrêt AMAZON du 11 juillet 2013 a même eu le temps de préciser que le droit de l’Union Européenne ne s’oppose pas à un système de prélèvement général assorti de la possibilité de remboursement. Elle a toutefois posé des conditions :

  • des difficultés pratiques doivent justifier ce mécanisme
  • le droit au remboursement doit être effectif et ne doit pas rendre excessivement difficile la restitution de la redevance payée.

Jusqu’à présent la France avait plutôt un zéro pointée en la matière, jusqu’à ce que…

Un parcours tortueux … – par laurent KB CC BY-NC-SA 2.0

Happy ending !

Ce n’est que le 10 décembre 2013, soit quasiment deux années après l’adoption de la loi exonérant « effectivement » les professionnels du paiement de la RCP, que l’exécutif a enfin pris le décret miraculeux.

Ce décret prévoit à la fois une obligation d’informations par les revendeurs sur la RCP et la mise en place d’une procédure de sanction aux manquements à cette obligation par la répression des fraudes.

Les revendeurs auront l’obligation d’afficher de façon claire et visible à proximité du support vierge:

  • le montant de la redevance,
  • l’existence d’une notice explicative sur la RCP et ses finalités,
  • l’adresse du site internet où la notice peut être téléchargée

Pour les deux derniers points, il faudra encore attendre un arrêté du Ministre de la culture. Espérons cette fois-ci qu’il ne faille pas attendre deux années…

Pour les boutiques en ligne ou lorsque la mise en vente a lieu dans des conditions ne permettant pas un affichage, cette information doit être portée à la connaissance de l’acquéreur de « façon précise » par tout moyen.

Il y a ici une faille dans laquelle les revendeurs risquent de s’engouffrer. Qu’entend-on par « conditions ne permettant pas un affichage » ? Des présentoirs trop étroits ? Je n’espère pas. Le cas de la boutique de Hardware conservant tous son matériel à la vente dans une remise ? Vraisemblablement.

Dans tous le cas, le plus important est que l’acquéreur ait cette information.

Surtout, lorsque l’acheteur est un professionnel, ces informations devront obligatoirement figurer sur la facture et celle-ci devra rappeler que le remboursement de la RCP est possible.

Fini les droits impossibles à faire valoir, les professionnels pourront enfin obtenir le remboursement de la RCP acquittée !

Ce décret, qui fût étrangement long à adopter, est une excellente nouvelle pour les professionnels, grands consommateurs de supports de stockage.

Les montants économisés ne sont pas négligeables. Voici quelques exemples calculés d’après les barèmes Copie-France 2013:

  • un CD R de 700 Mo = 0,35 euros de RCP, une tour de 100 CDR = 35 euros,
  • un DVD R de 4,7 Go = 0,90 euros de RCP, une tour de 100 DVR = 90 euros !
  • une tablette 32Go = 15,84 euros
  • un smartphone 16Go = 9,6 euros

Toutefois, il faudra encore faire preuve de patience : ce dispositif n’entrera en vigueur que le 1er avril 2014.

D’ici là, professionnels, reportez autant que possible l’achat de supports vierges, inscrivez cette date dans vos agendas et organisez-vous pour réclamer dès le 1er avril 2014 le remboursement de la RCP payée sur tous supports achetés à partir de cette date !

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